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EPR : AREVA se défend des accusations du Canard enchainé et s’enfonce

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Le canard a jeté un pavé dans la mare en dénonçant qu'”Areva savait depuis neuf ans qu’un sérieux problème risquait de compromettre la solidité du coeur de plusieurs réacteurs, dont celui de l’EPR de Flamanville”.
A cause des teneurs trop élevées en carbone (jusqu’à 50% d’écart), la résilience de l’acier est très largement inférieure aux limites, même selon les normes de 1974.
La résilience – la capacité à absorber l’énergie d’un choc et à résister aux fissures – se calcule en joules (J).
La limite était de 56 Joules en 1974. Elle a été portée à 60 Joules en 2005.
Sur la cuve de l’EPR de Flamanville, les plus basses valeurs mesurées ne sont que de 36 Joules (40% inférieures à la limite), et en moyenne de seulement 50,2 Joules. Danger !
Pour Areva, cette anomalie est “inhérente au refroidissement des grands lingots. C’est la physique qui veut ça.” La cuve est défectueuse du fait de la physique.
L’IRSN indique que “la technologie de fabrication […] est en régression technologique”, tandis que l’ASN (Autorité – indépendante – de Sûreté Nucléaire) dénonce le manque de professionnalisme d’Areva au journal.
Le plus inquiétant, c’est qu’Areva et EDF sont optimistes. Ils semblent vouloir démarrer quand même cette dangereuse installation :
Areva a mandaté un expert indépendant pour analyser les pratiques de forgeage au Creusot et vérifier la conformité des procédures et des pièces forgées avec ses exigences.
Cette analyse porte sur les défauts des processus de fabrication, et aussi sur l'”imprécision” des contrôles qualité.
Cette étude ne porte pas sur la cuve elle-même.
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“Nos premières études vont dans le sens d’une absence de risque pour la sûreté”, a indiqué Patrick Poret, directeur des équipements lourds d’Areva.
L’analyse de la méthode de fabrication et de contrôle, qui semble être positive, ne remet pas en cause la défectuosité de la cuve, avérée après l’étude conduite par l’ASN.
Le malade est mort, mais l’opération s’est parfaitement déroulée. Vous voilà rassuré-e.
Mais : on peut lire dans le JDD :
“Un sentiment partagé par le haut-commissaire à l’énergie atomique, Yves Bréchet, qui se veut lui aussi rassurant :” “La situation n’est pas de nature à poser de problème pour la cuve. Les calculs sont optimistes.”
Nous voilà donc dans le sentiment, et l’optimisme un tantinet forcé, vu l’historique…
Est-ce à dire que les calculs ont-été refaits à la va-vite pour nous expliquer qu’on peut accepter une résilience des matériaux jusqu’à 40% inférieure à la limite, avec une teneur en carbone deux fois trop élevée ? Avaient-ils vu trop large dans leurs études, qui ont pourtant pris plusieurs années ? Et après la découverte des anomalies, en deux coups de cuillère à pot, les calculs montrent enfin que la sécurité est déjà bien suffisante ?
Ou bien n’a-t-on pas les moyens de refaire une cuve, et va-t-on bricoler la partie accessible – le couvercle -, en délaissant le fond de cuve qui devra recueillir le magma nucléaire en l’état, c’est-à-dire avec une résilience affaiblie, à nos risques et périls ?
La réglementation prévoit en effet qu’“un fabricant peut choisir de ne pas respecter les valeurs minimales figurant dans le décret, s’il justifie de la mise en oeuvre de dispositions permettant d’obtenir un niveau de sécurité global équivalent” ! Va-t-on nous expliquer qu’on avait pris trop de marge, ou bien que de nouveaux calculs réalisés cette année viennent compromettre nombre d’années d’études ou de calculs (et pas un EPR ne tourne dans le monde) ?
Nous avons tous conscience de l’état d’Areva : le cours d’Areva a fondu de 77%, l’entreprise serait en faillite si l’État ne venait la garantir, et il faudrait recapitaliser (= dette publique) Areva de nombreux milliards € pour qu’elle ne s’effondre pas.
Accepter cet état de fait revient à liquider la sécurité nucléaire pour le traitement des déchets nucléaires. Et en même temps, cela condamne la France à accepter d’augmenter sa dette publique. Faire semblant que tout va bien, alors que la faillite de l’EPR est manifeste, mondialement.
Continuer, c’est la remettre à plus tard, en conservant la valeur nominale de cette dette dans les comptes publics pour le prochain gouvernement, qui dira que c’était la faute de l’autre – ils l’auront découvert entre temps dans les comptes  ; et les français-es paieront.
EDF ne peut pas s’attaquer à l’ASN pour lui reprocher ses contrôles. C’est la mission de l’ASN. En “toute” indépendance.
Les lobbyistes nucléaires issus d’EDF dénoncent l’ASN.
Ce sont donc le lobby d’EDF, des retraités d’EDF, X-mines, qui s’y collent :
André Pellen, un ancien ingénieur EDF, a écrit une lettre à l’ASN au nom de son collectif, estimant qu’“en révélant les défauts du fond de la cuve de l’EPR et de son couvercle, l’ASN abuse de son pouvoir et met en danger la filière nucléaire française !”
Il ne pose aucune question sur les risques liés aux découvertes de l’ASN, mais interroge l’ASN sur les risques encourus par la filière, sur les méthodes et la méthodologie du contrôleur.
L’ASN n’aurait pas respecté l’omerta patriotique, alors qu’Areva est en grand danger, et menace l’ASN : “Dans le cas contraire, que mes amis et moi n’envisageons pas une seconde – les informations concernées, réputées d’accès public, ne sont en aucune manière couvertes par le secret défense – un mutisme équivalent à une rétention d’informations par un organisme public s’exposerait à une sanction au plus haut niveau de l’État, que nous serions contraints de solliciter pour recouvrer nos droits citoyens.
J’attire votre attention sur le fait que ce courrier est une lettre ouverte, susceptible de vous parvenir en nombre, sous le nom et la qualité de personnes et d’organismes qui en partagent le contenu, avec la volonté de matérialiser ainsi une démarche collective la plus ample possible.”
Ah ! Le contrôleur qui révèle un défaut – c’est sa mission de sûreté – s’exposerait à une sanction du plus haut niveau de l’État pour éviter que ce machin nous pète à la figure !
A contrario de ceux qui ont commis ou caché des erreurs, fautes, ou accidents.
Quant aux révélations du canard enchainé, c’est Areva qui s’y colle, au travers d’un communiqué de presse.
Qu’y disent-ils ? Le Canard s’est trompé, ils n’ont pas fait d’études de résilience en 2007, mais des études de positionnement du lingot (de 155 t.), et que c’est à cette occasion qu’ils ont découvert la teneur en carbone, et qu’ils ont communiqué ces données à l’État dès 2008. L’État ne l’aurait pas vu [non pas parce que les données étaient noyées dans un fatras de données au jargon ésotérique et optimiste, NDLR], donc il n’y a pas de responsable.
“Ces résultats ont été communiqués aux autorités dès la fin des analyses, puis rendus publics.” Donc le public est complice de ce naufrage et de cette faillite, et les citoyens n’auront que leurs yeux pour pleurer quand :
  • Ils devront recapitaliser l’entreprise pour toutes ses défaillances (EPR, URAMIN, incidents,…) 
  • Ils doivent déjà trois fois le prix exprimé par les experts, déjà, mais des milliards sont à prévoir ;
  • ces milliards et tous les autres seront imputés à la dette publique, aux citoyens et contribuables donc, en pure perte ;
  • les yeux d’Angela seront fixés sur un des pays les plus endettés d’Europe (et nucléarisé du monde)… : nous ;
  • et si on le démarrait quand même pour prouver qu’on avait raison ? Et Boum !
Pourtant, l’ASN (l’Autorité indépendante qui abuse de son pouvoir contre EDF) alerte sur son manque de moyens. Une grosse partie du budget normalement affectée à L’ASN se retrouve versée au budget général. « Cela correspond à la fois au souhait du gouvernement de limiter la fiscalité affectée et à la volonté du président de la République de ne plus créer d’impôts nouveaux », dit Bercy, qui en profite, donc.
Est-ce à dire que pour assurer la sécurité nucléaire, il faut d’abord ne pas y trouver de faille de sécurité, et donc supprimer les contrôles ? Bonne chance à toutes et tous.
Canal+ et l’équipe de Spécial Investigation ont consacré un documentaire sur les accidents de Saint-Laurent des Eaux, le 4 mai 2015.
Dans l’extrait ci-dessous, on peut voir l’ancien président d’EDF, Marcel Boîteux, qui a accepté l’interview. Ce qu’avait refusé l’actuelle direction d’EDF.
Niant d’abord tout accident nucléaire en France lorsqu’il était président, il l’admet ensuite. Il admet les rejets volontaires et illégaux de plutonium dans la Loire, et admet avoir caché l’accident nucléaire en le comparant à un accident de voiture. Cela nous a été caché pendant 35 ans. C’est le rapport interne détenu par un employé de la centrale qui a permis d’en faire la preuve.
Nous avons besoin donc d’une Autorité de contrôle efficace, avec les moyens nécessaires à l’exercice de sa mission.
Et nous avons besoin d’une Autorité de contrôle vraiment indépendante, car l’ASN aurait bien été aussi destinataire de ce rapport confidentiel…
Une alternative à “Boum, big Badaboum” ? => La transition énergétique, la décentralisation, et les ENR.
Merci pour les générations futures, en arrêtant de leur donner le choix entre rien, en leur enfouissant les déchets nucléaires sous les fesses, en leur disant qu’ils pourront en faire ce qu’ils veulent d’ici 100 ans.
nono
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