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L’affaire du voile à la crèche Babyloup : comment concilier en France la pratique religieuse et la vie en société ?
En décembre 2008, la crèche associative Babyloup de Chanteloup-les-Vignes (Yvelines) licenciait une employée pour avoir refusé de retirer son voile sur son lieu de travail. L’employée juge son licenciement discriminatoire et réclame 80.000€ à son ex-employeur. L’audience au Prud’hommes s’est déroulée le lundi 8 novembre dernier (avec décision de justice en décembre prochain).
Babyloup a été fondée en 1991 par une réfugiée chilienne pour proposer un service de crèche à des personnes travaillant à des horaires décalés : en 2002, Baby Loup devient en effet la seule crèche française ouverte 24H/24 tous les jours de la semaine. Elle offre également une activité professionnelle aux femmes du quartier, en les embauchant et en leur proposant une formation rémunérée aux métiers de la petite enfance. Dans une ville où plus de cinquante nationalités sont représentées, cette crèche est un tremplin pour l’insertion sociale de nombreuses familles. Les 80.000€ réclamés mettraient en péril l’activité de l’association.
Le 8 novembre, la chaîne parlementaire LCP organisait un débat autour de ce sujet. Ce fut l’occasion pour les invités de redéfinir les contours des notions de laïcité et de service public.
François Pupponi, maire PS de Sarcelles, témoigne de la difficulté quotidienne des élus de terrain à traiter ces questions et réclame la création d’un “Observatoire de la laïcité” pour les y aider. Face à lui, Nicole Ameline, député UMP.
L’universitaire et imam Mahmoud Doua apporte des réponses éclairées permettant de concilier la pratique religieuse et la vie en société.
Enfin, l’intellectuelle
Caroline Fourest, à son habitude, est extrêmement claire dans son affirmation du principe de laïcité (
“tout court!”) et dans sa dénonciation des dangers qui la menacent et favorisent le développement du communautarisme et du racisme :
- La confusion populiste, y compris au plus haut sommet de l’Etat, favorisant la division plutôt que la cohésion : la notion de “laïcité positive” prônée par Nicolas Sarkozy à Rome en décembre 2007 n’a aucun sens (c’est une invention de l’église catholique, prônée par le cardinal Ratzinger, le futur Benoît XVI, en 2005…). Il s’agirait de faire une place de choix à la parole de l’Eglise dans l’espace public et politique (comme en Italie ou aux Etats-Unis) – ce qui est aussi “une façon habile et politique de faire passer la laïcité pour négative” ;
- La ghettoïsation sociale de pans entiers du territoire, délaissés par l’Etat ;
- L’extrémisme religieux, qui manipule en attisant les ressentiments (le 27 octobre dernier, le chef d’Al-Qaïda, Oussama ben Laden, a affirmé qu’il était “du droit” des musulmans de riposter par la violence à l’interdiction du voile intégral en France…)
Bien entendu, il ne faut pas confondre la religion (comme ensemble intime de croyances et de pratiques) avec l’intégrisme, qui, toujours selon Caroline Fourest, est “l’instrumentalisation politique de la religion à des fins intolérantes” (La dernière utopie – menaces sur l’universalisme, 2009).
Rappel : Qu’est-ce que la laïcité ?
- La séparation des églises et de l’État (loi de 1905) ;
- La neutralité de l’État, et donc des agents publics (interdiction de tout port de signes religieux visibles) ;
- La liberté de conscience (article 1 de la Loi de 1905), la liberté de croire ou de ne pas croire et la liberté de pratiquer une religion dans le respect des lois ;
- La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte (article 2 de la Loi de 1905).
Laetitia Sanchez
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