Accueil > écologie > Sommet de Copenhague, 12 jours pour arriver à un accord sur la réduction des GES : J-8
Quand le magicien tient la pièce dans la main droite, et que de la main gauche, il désigne la lune, on ne regarde pas la main gauche, encore moins la lune. On regarde la pièce.
L’objectif de ces 12 jours est d’arriver à un accord sur la réduction des gaz à effet de serre (GES). De façon différenciée entre pays riches et pays émergents, le 18 décembre, les pays participants devront avoir indiqués des objectifs chiffrés, en tonnes, en pourcentage, en date et en sommes destinées à l’aide des pays en développement. On pourrait tout aussi bien parler de compensations, ou encore de dommages et intérêts, car ce sont les pays non-pollueurs qui sont les premières victimes du réchauffement climatique. Il faudra quantifier, savoir qui paye, à qui, et enfin, pour quoi faire.
Pour compliquer la lecture des transactions qui ont cours en ce moment à Copenhague, les pays jouent sur des règles temporelles différentes.
Si le but du GIEC est de réduire leurs émissions de 25 à 40 % globalement d’ici à 2020 par rapport à 1990, chaque pays vient apporter ses propres critères, que l’on tolère pour ne pas faire échouer ce sommet dès son commencement.
L’Union européenne annonce une réduction entre 20 % et 30 % de ses émissions par rapport aux niveaux de 1990. En cas d’accords.
Mais : les engagements sur le territoires de l’UE ne seraient que de 15% de réduction d’émission de GES. Le reste sera négocié sous d’investissements dans les pays du sud. C’est la notion d’achat du droit de polluer qui reste décrié. Cependant, il s’agit bien là de chiffrer les aides aux pays en développement.
L’UE fait figure de pionnier, car pour bien d’autres régions du monde, les ambitions sont plus limitées :
Pour saisir la mesure des enjeux, et comprendre ce que chaque pays met sur la table des négociations.
On peut rappeler que les Etats-Unis, pays à l’échelle d’un continent, disposant d’un haut niveau de vie, connait des variations de températures très importantes du nord au sud. Au nord on chauffe, au sud on climatise. Cette échelle continentale pour un pays se fait ressentir sur les transports, qui pour la plupart se font en automobile, et aussi en avion. Le ferroviaire n’étant utilisé que pour le fret.
L’urbanisme de villes aussi induit des transports automobiles très importants. Nos villes européennes sont inscrites en creux, avec un centre ville, souvent historique, peu élevé, et des banlieues qui s’élèvent en immeubles d’habitation. La densité de notre population explique cela, tout comme un espace plus restreint. Nous avons construit serré, avec des transports en commun qui mènent en étoile vers le centre ville, un centre d’affaires, marchand, et culturel. Aux Etats-Unis, c’est le contraire. Dans le centre, on trouve les buildings, et les habitations s’étalent en banlieues où on habite des maisons. Cet étalement urbain ne favorise pas les transports en commun, et impose l’usage de la voiture et donc une surconsommation de carburant.
Les Etats-Unis produisent 1/4 des richesses de la planète.
En ce qui concerne la Chine, que nous appelons pays émergent, mais que les chinois préfèrent appler pays en développement, ce pays a connu une croissance à 2 chiffres qui faisait rêver les pays les plus riches. Et aujourd’hui encore, sa croissance flirte avec les 8%. Cela ne va pas sans une certaine gabegie, tant financière qu’industrielle. Et ses corollaires en matière de pollution.
Avec un niveau de vie qui s’améliore, le taux de rejet de CO2 par an et par habitant croît en proportion de la consommation. A près de 4 tonnes/an/hab, en multipliant par le nombre d’habitants, 1.350.000.000, cela en fait le plus gros émetteur du monde.
La chine est devenue notre usine. Pour la Chine, c’est aux pays développés que revient la priorité de l’action sur les rejets de GES.
En Europe, on se tape sur le ventre : Nous ne sommes pas les plus gros émetteurs de GES, tant par en tonnes par an et par habitant, qu’en % des émissions mondiales. Pourtant, avec 15,3 % des émissions mondiales de CO2, il n’y a pas de quoi pavoiser. L’Union Européenne est le 3ème pollueur du monde. Mais nous, Européens, préférons raisonner pays par pays, la facture passe mieux ainsi. La France ne figure plus dans les 10 pays les plus pollueurs du monde. Seules l’Allemagne et la Grande-Bretagne y figurent, respectivement en 6ème et 8ème position.
Pourtant en Europe, par contrainte d’espace et de densité de population, et historiquement, pour avoir fait évoluer les villes plutôt que d’en construire de nouvelles, nous bénéficions d’atouts pour une consommation maîtrisée de l’énergie et donc de rejets de gaz à effet de serre. Un réseau de transport en commun insuffisant mais possible par la configuration des villes, des distances limitées entre villes, zones d’affaires et même entre Etats, des circuits courts possible entre production agricole et villes, voire mégapoles, des rivages très découpés, de l’eau à profusion, un climat tempéré, voilà des atouts qui devraient nous mettre en pointe de l’écologie mondiale. Avec une délocalisation (souvent forcée) qui a fait de la chine notre usine, nous devrions être plus brillants que nous l’affirmons : 3ème, c’est mieux que 1er mais tout de même, nous avons une belle marge de manoeuvre avec de tels atouts.
Mais nos comportements sont les mêmes qu’aux USA : des voitures, du routier, et pas de modularité dans les transports. Pas de co-voiturage, des voitures qui s’empilent aux abords des villes, contenant 1 passager : le conducteur. Nous faisons des efforts pour isoler les maisons; grâce aux subventions (crédits d’impôts, prêts à taux réduit ou 0), mais une immense partie des locataires continuent d’habiter des logements mal isolés, alimentés au nucléaire et au charbon.
Même avec de la bonne volonté, lorsqu’on souhaite changer de mode de transport, pour le vélo ou la marche, par exemple, cela se fait au péril des non équipés de carrosserie protectrice.
Quant aux circuits courts, on a beaucoup de possibilités, qu’on préfère écarter pour privilégier les solutions industrielles… Donc on a de la marge, mais il faudra du courage, et du courage politique pour arriver à nos objectifs.
Tout avait pourtant commencé en fanfare. On va sauver le monde, c’est le sommet le plus important du monde en ce moment, le sujet du moment. Comme l’a dit Jean-Louis Borloo, ministre de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer, “à Copenhague, se jouera probablement le destin du monde”.
Il est difficile de se projeter 100 ans dans notre futur. Nous-même ne seront plus là, et il y a des chances que même nos enfants n’y soient plus. C’est une humanité pas encore née qui y vivra. Elle y vivra avec une géographie nouvelle, quand pour nous, cette géographie nous semble “immémoriale” à l’échelle de nos civilisations. Cette humanité devra avoir accompli une conversion technologique incomparable : la pénurie d’énergies fossiles obligera les humains à circuler moins, moins vite, autrement. Il faudra utiliser les ressources dont on disposera alors : le vent, le soleil, le bois. Peut-être l’hydrogène, qui semble la seule voie restante, si nous trouvons le moyen de produire cette source d’énergie sans produire de CO2 qui contribuerait encore au réchauffement climatique. En l’état actuel portant, cette solution semble inexploitable, bien trop coûteuse en énergie. Difficile à stocker, corrosif, explosif, l’hydrogène reste une piste d’étude. Mais pour l’indispensable, en quantité limitée, on pourra encore s’envoler vers les cieux.
La disparition du pétrole marquera la fin de la pétrochimie, avec laquelle nous fabriquons nos routes, nos plastiques, solvants, détergents…et médicaments. Et pourtant nous seront plus nombreux. Peut-on faire raisonnablement le pari de cette conversion réussie ?
Le monde de demain est à réinventer complètement. Peut-on dire si dans 100 ans nous aurons les moyens d’entretenir des satellites, aujourd’hui si indispensables à l’homme, si nous aurons réussi à conserver des transports aériens (sans même parler de nos énormes cargos volants capables d’emporter 500 personnes vers des paradis touristiques) ? Comment alimenterons nous en denrées, en eau, en énergie les mégapoles ? Comment se chauffera-t-on dans les zones froides, et comment trouverons nous de la fraîcheur dans les zones chaudes, surtout avec un climat réchauffé ? Et quelle conversion agricole devrons-nous avoir fait pour nourrir tous les humains, durablement ? Comment conserver une eau potable accessible à tous ?
Une conversion réussie ne se fait pas les pieds au mur, elle se construit maintenant pour les décennies et les siècles à venir. Il s’agit pas de ne pas brûler toutes nos réserves sans rien n’en avoir fait. L’enjeu est phénoménal, et nous devrons faire preuve de beaucoup d’intelligence, de science et d’ingénierie pour résoudre tous les problèmes posés. Comme cela ne suffit pas, il faudra faire preuve d’un grand courage politique, dès aujourd’hui. Copenhague est l’occasion de montrer ce courage. Et il faudra aussi que la population, dans son ensemble, ait pris conscience de l’urgence climatique et écologique. On ne peut espérer pouvoir préparer la société à des changement si essentiels sans la participation de tous.
Copenhague n’est pas une fin en soit. A Rio, en 1992, on avait ouvert une porte lors du sommet de la Terre. A Kyōto, on a fait un premier (tout petit) pas lors de la signature du protocole de Kyōto. A Copenhague, nous avons l’occasion de faire un autre pas. Mais déjà, 2 pas, c’est marcher un peu. Marcher vers notre avenir, sur une route qu’il nous faut paver, et pas de bonne intentions.
Le débat semble escamoté pour les citoyens, ai-je dit… A l’heure où les négociations font rage à Copenhague, la France est en train de se regarder le nombril, en occultant ce grand pari international avec un débat national désuet, où l’on débat de l’identité nationale, de l’immigration, du droit de construire des minarets ou d’arborer des drapeaux étrangers dans les mairies (!). D’un côté, l’avenir de la planète, de l’autre des histoires de drapeaux. Pour le moins, il y a une erreur de timing. Sarkozy s’est pris les pieds dans le calendrier, si on voulait faire aussi de ce sommet une prise de conscience des enjeux pour nous tous, citoyens. Le sens du calendrier était pourtant un de ses atouts.
Pendant ce sommet de Copenhague, entre le débat national et la grippe A, les JT nous indiquent le bilan carbone des reportages qu’ils vont faire à l’autre bout du monde pour nous faire constater de visu les dégâts du réchauffement climatique. Le présentateur (ou la présentatrice) nous explique alors qu’une somme équivalente (euh ?) sera affectée par la chaîne pour la reforestation, à Madagascar ou ailleurs. D’ailleurs, pourvu que ça dure, et qu’on continuera les bilans carbone et les actions de reforestation pendant le mondial 2010 en Afrique du Sud.
Mais quid des enjeux, à l’échelle de chaque pays ? Quelles sont les solutions préconisées ? Où en sont les négociations ?
Plutôt qu’un débat national sur l’identité, ne pourrions-nous pas organiser un grand débat sur nos responsabilités sur le climat, et les moyens que nous pourrions inventer pour atténuer l’impact de ce changement climatique ? Et au moins nous informer ?
Impression de Sebastien, un jeune internaute de 16 ans, “LA PRISE DE CONSCIENCE ÉTAZUNIENNE N’EST QUE DU VENT”
lire le texte complet sur http://www.arretsurimages.net/contenu.php?id=2571
Une majorité de citoyens des Etats-Unis (61%) n’avait pas entendu parler de Copenhague, avant le début de la conférence… Y a du boulot !
nono
c’est très vrai ce que vous dites, étant américain moi-même et ayant de la famille et des amis aux US, j’ai pu vérifier qu’environ à peine 1/3 d’entre eux étaient au courant de Copenhague et ce d’autant que l’équipe gouvernementale de Barack Obama est sur les questions étrangères en pleine négociation avec la Russie depuis quelques semaines en Suisse sur la révision conséquente du nombre de missiles à tête nucléaire – traité de réduction des armes stratégiques (START 1) qui a expiré samedi dernier. Sur les questions intérieures il vient de renforcer son plan national sur la santé et du point de vue de son calendrier Copenhague vient à un très mauvais moment, ce qui explique aussi pourquoi dans un premier temps il ne devait pas être présent à la clôture..
De plus en dehors du fait que le protectionnisme américain bloque certains contenus informatifs au niveau de leurs rédactions news TV, radio et presse écrite repose sur l’antithèse des US qui se base non pas sur 1990 mais sur 2004 comme rampe de lancement dans le calcul des émissions de Co2..
A mon sens on est très mal parti pour conclure quelque chose d’intelligent dans ces conditions, d’autant qu’en plus N.Sarkozy aura créé un nouveau froid en aparté avec son accord récent certes intelligent avec l’Afrique, mais “hors accords de négociation” à Copenhague.
Sans compter les problèmes d’organisation, 15.000 places pour 50.000 personnes attendues, un “tri sélectif” fait par des anonymes pour les ONG etc etc.. on dirait que tout est fait pour créer les conditions d’un échec à l’issue de ces décisions néanmoins cruciales pour le monde entier.
L’on s’achemine tout droit vers un nouveau sommet encore plus difficile dans un an car entre deux les pays de l’Europe (qui n’est d’ailleurs pas “qu’un bon élève” en la matière) va sans doute rechercher – comme d’autres pays qui viendront les rejoindre – à instituer des règles draconiennes à l’égard des puissances polluantes d’ici cet autre sommet(ce qui est en soi une bonne chose aussi).
Aussi mon point de vue demeure le même depuis x années sur la question : sans synchronisation globale préalable aucune chance d’aboutir ………
Christopher