J'ai été frappée, sur internet, à la radio, à la télévision, par ces témoignages de Tunisiens, enfin libérés après 23 ans de surveillance et de délation : "On avait pris l'habitude, lorsqu'on parlait de se retourner pour voir si quelqu'un nous écoutait." Les témoignages abondent d'opposants privés d'emploi, arrêtés arbitrairement, harcelés psychologiquement...
Brrr ! Heureusement, nous avons la chance de vivre dans un état démocratique, où la liberté d'expression et d'opinion sont des droits humains imprescriptibles. Où les bafouer constitue une discrimination. Où l'opposition politique est légitime, et non contrôlée par un Etat policier.
Souhaitons ne plus jamais revivre les heures sombres de la Collaboration, où l'on épiait son voisin, le dénonçait au besoin, puis laissait la Gestapo l'emmener, sans bousculer son petit train train quotidien ni sa bonne conscience.
Heureusement, si "Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant / (...) à l'heure du couvre-feu des doigts errants / Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE / Et les mornes matins en étaient différents" (Aragon, "Strophes pour se souvenir", en hommage aux membres de l'Affiche Rouge, des immigrés engagés dans la Résistance et tués pour cela).
Rappelons-nous ce poème, écrit au camp de Dachau en 1942 et attribué au pasteur Niemöller :
Quand ils sont venus chercher les communistes
Je n’ai rien dit
Je n’étais pas communiste.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes
Je n’ai rien dit
Je n’étais pas syndicaliste.
ils sont venus chercher les juifs
Je n’ai rien dit
Je n’étais pas juif.
Quand ils sont venus chercher les catholiques
Je n’ai rien dit
Je n’étais pas catholique.
Quand ils sont venus chercher les francs-maçons,
je n’ai rien dit
Je n’étais pas franc-maçon.
Quand ils sont venus me chercher
Il ne restait plus personne pour protester.