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La méthanisation n’est pas la solution au problème des algues vertes

Le 7 juillet 2011, en visite dans le Finistère, Nicolas Sarkozy évoquait le problème des algues vertes, en refusant "de désigner des coupables, de montrer du doigt les agriculteurs", et en dénonçant les "intégristes" de l'écologie.
La veille de la visite du chef de l'Etat, l'association écologiste "Eaux et Rivières de Bretagne" avait dénoncé un projet d’assouplissement de la réglementation sur les épandages d’azote agricole contenu dans les déjections animales (notamment de porcs), à l’origine de nitrates. "Personne ne peut comprendre qu'au moment où des millions d’euros vont être investis à l’amont des baies à marées vertes pour réduire les fuites de nitrates vers les eaux, le gouvernement s’apprête à relever les seuils d’épandage et à décourager la culture de l’herbe", écrivait dans une lettre ouverte le président de l’association, Jo Hervé.
Pour Nicolas Sarkozy, la solution aux excès de nitrates provenant des lisiers se trouverait dans la méthanisation : « On va privilégier les appels à projets, notamment concernant les unités de méthanisation, ce qui permettra aux agriculteurs à la fois de protéger l’environnement, et de créer des sources de revenus ».
"Créer des sources de revenus" sous forme de subventions, c'est tout simplement mettre en œuvre un principe "pollué-payeur/pollueur-payé" : les contribuables, victimes de la perte de qualité de l'eau et du littoral, paieront les subventions aux pollueurs.
En outre, laisser croire que la méthanisation serait une solution au problème des nitrates est une contre-vérité. La méthanisation est le processus naturel biologique de dégradation de la matière organique (matière carbonée) en absence d'oxygène. Dans une interview publiée dans Le Monde du 15 juillet 2011, Alain Menesguen, directeur de recherche à l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), démontre la contre-vérité : "Le méthane se compose d’un atome de carbone et de quatre atomes d’hydrogène, il ne contient pas d’azote ! La méthanisation extrait le carbone du lisier pour produire du biogaz, mais l’intégralité de l’azote se retrouve dans le résidu liquide répandu dans les champs. La méthanisation peut même accroître la quantité finale d’azote, car on ajoute des végétaux pour améliorer le processus…"
Selon l'avis du Comité Scientifique "algues vertes" : "La méthanisation a de nombreuses vertus qu’il ne s’agit pas de contester mais, dans un contexte d’urgence où la priorité clairement désignée est la gestion de l’azote (voire, très secondairement, du phosphore), l’utilité n’est pas avérée de développer cette technique qui ne va traiter que le carbone, sans apporter de contribution à la résorption des excédents d’azote ou de phosphore (si l’on excepte la minéralisation de l’effluent présumée améliorer ses qualités d’usage agronomiques, mais qui va intervenir tout à fait à la marge dans le contexte présent).
Qui plus est, compte tenu du faible pouvoir méthanogène des effluents animaux, il est toujours nécessaire d’ajouter aux lisiers différents substrats carbonés qui vont aussi, dans la plupart des cas, apporter de l’azote supplémentaire dans une situation déjà en excédent."
Jetons un coup d’oeil sur un tableau établissant l’aptitude du lisier à donner du méthane (source : Potentiel Méthane)
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Que ce soit de porcs ou de bovins, le lisier est pauvre en carbone. Or pour faire du méthane, CH4, il faut du carbone. Pour le lisier de porcs, d’autres études font même état de chiffres de l’ordre de 5m3 de méthane par tonne de lisier. A comparer aux déchets d’abattoirs qui, eux, en sont au minimum 10 à 20 fois plus riches.
Selon le scientifique Alain Menesguen - l’un des premiers à démontrer la responsabilité des épandages agricoles dans la prolifération des algues vertes : "La seule vraie solution, c'est d'émettre moins d'azote à la source !
Les scientifiques estiment à 2 ou 3 mg/l la quantité "naturelle" de nitrate dans les rivières bretonnes. En 1971, date des premières mesures, on était déjà à 4,4 mg/l.
Aujourd'hui on atteint 30 mg/l en moyenne. Chaque année, c'est l'équivalent d'un Amoco Cadiz de nitrates qui se déverse sur les côtes bretonnes ! C'est désagréable à entendre, mais redescendre à 20 mg/l n'aura aucun effet sur les marées vertes. Il faudra passer sous la barre des 10 mg/l pour commencer à rendre la quantité d'algues vertes acceptable. Cela demande un effort considérable."
En conclusion, le « modèle agricole breton » est bien en crise. Et ce n’est pas en industrialisant davantage l’élevage breton que l’on répondra aux enjeux environnementaux et sociaux. Sur la décennie 1990-2000 ce sont plus de 30000 exploitations agricoles qui ont disparu en Bretagne. C’est d’un autre modèle agricole dont la Bretagne a besoin, un modèle qui respecte l'environnement, l’homme et l’animal.

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